La Liberté

Michel Ritter, artiste d’air et de force

Michel Ritter, artiste d’air et de force © Charly Rappo
Michel Ritter, artiste d’air et de force © Charly Rappo
Publié le 07.10.2021

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Fri Art » La Kunsthalle fribourgeoise consacre une exposition aux œuvres de son fondateur.

Michel Ritter est connu pour avoir été le fondateur de Fri Art, le directeur du Centre culturel suisse à Paris, l’ami de nombreux artistes. Mais le Fribourgeois était aussi un créateur. Une activité éclipsée par son travail curatorial. A l’occasion des 30 ans de la Kunsthalle fribourgeoise dans ses locaux de la Basse-Ville et des 40 ans de la première exposition Fri-Art 81, l’espace culturel présente une succincte rétrospective de son travail sous le titre Air Power = Peace Power. «Nous espérons qu’elle attirera l’attention sur sa création», souligne Nicolas Brulhart, son directeur artistique, qui a choisi parmi les plus de 1000 œuvres conservées lesquelles présenter au public.
Comment qualifier le travail de Michel Ritter? «Il était hypersensible, minutieux. Il travaillait par petits gestes, dans une démarche minimaliste, poétique», répond-il. Mais Nicolas Brulhart y voit d’autres constantes, souvent une référence à l’air (comme la machine à bulle installée à l’entrée), à l’éther, à l’énergie, aux objets du quotidien observés de manière cocasse et au spirituel.

Au sous-sol sont projetées des vidéos qui s’inscrivaient dans des installations, et des films d’animation (anima, en latin, signifie âme), probablement jamais montrés au public. Intrigantes et parfois drolatiques.
A côté, à la réception, c’est un étrange totem qui accueille le visiteur. Une bombonne de gaz couronnée d’une tête de chamois et surmontée d’un casque de séchage pour coiffeur émerge d’une flaque noire sertie de petits soldats argentés. Cette sculpture hétéroclite montre-t-elle l’énergie corsetée d’une Suisse incarnée par ce trophée très alpin? Lors de l’ascension de la cage d’escalier, nous retrouverons ces têtes d’animaux accrochées à leur bombonne, tandis que sur le mur, des litanies de chiffres, des relevés d’on ne sait quoi, que l’artiste a nimbés d’un brouillard au crayon papier, distillent une atmosphère climatique nébuleuse.
Le cœur de l’exposition se trouve au premier étage. Au centre, le rouleau d’un orgue de barbarie est déployé sur un socle. Un jouet, un petit avion militaire posé sur cette piste improvisée semble attendre le décollage. Les perforations évoquent un pilonnage en règle, les orgues de Staline (un lance-roquettes soviétique) et un monde de barbarie. Avec peu d’intervention artistique sur ces objets, Michel Ritter ouvre un énorme champ de réflexion. Très fort. On verra encore ses premières utilisations de la ouate, collée sur des photographies, troublantes métamorphoses fantasmagoriques, des photos de bébés trouées par des perforatrices, des appropriations d’images d’actualité devenant atemporelles. Certaines pièces ont un demi-siècle et elles ont toujours quelque chose à nous dire. Tamara Bongard
> Jusqu’au 9 janvier à Fri Art, Fribourg.

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